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« Les objets trouvés sont priés de tenir en laisse leur avis » : si je vous sors une telle phrase aujourd'hui, elle n'aura certainement pas la même résonance qu'à l'époque. Nous, élevés à l'absurde, anglais ou surréaliste, de Woody Allen à John Lennon, on a déjà en gros épuisé les associations contradictoires les plus étonnantes, qu'il s'agisse du sens ou de la forme. Les Révolutions Dada et Surréaliste sont bien loin derrière, mais à ne pas s'y tromper, ce sont elles qui rendent désormais ce type de phrase absurde terriblement banal. Epuisé le filon donc, et le Pop Art, le Situationnisme, le Citationnisme, le Graphitisme, le Psychédelisme (puis arrêtons-là les mots en –isme !) ou bien encore une certaine forme du Land Art ne sont que des dérivés lointaines de ces deux révolutions, les seuls du XXè siècle si on se mettait enfin à employer le mot « révolution » pour des courants qui le justifient véritablement (c'est-à-dire avec pour conséquence un renversement de l'ordre établi et contesté…). Cette exposition donc nous (r)assure sans cesse que Dada n'est pas mort, pourtant si on était un peu honnête, on pourrait dire qu'il a quand même perdu de sa virulence, de son cri d'alarme. Aujourd'hui, en ne croyant plus en rien, en ayant complètement banni la naïveté, l'innocence en Art (sauf quand il s'agit de la tourner en dérision), les pieds-de-nez dada montrés dans Beaubourg apparaissent bien doux et délicats. L'expo cherche peut-être un peu trop à nous faire croire que le message Dada garde aujourd'hui une certaine force, et on a bien du mal à s'en convaincre tellement on est peu surpris, peu secoués. De grands sociologues parlaient de l' « épidermisation » de l'homme face à l'actualité (ouaaaah, bon je m'explique : à force de voir des « catastrophes » à la télé, on finit par avoir une seconde peau, une espèce de carapace, protégeant notre esprit, sauf une petite zone superficielle de l'émotion, l'affect extérieur : en gros on peut pleurer, s'indigner, mais en aucune façon, cette seconde peau nous permet de bien réaliser le drame qui nous est présenté), il en est ainsi de même pour l'Art, et nous devenons vaccinés au Dadaïsme grâce à cette épidermisation que nous avons subi après près de 80 ans d'histoire de l'Art Moderne puis Contemporain. Alors le message qui nous est asséné ici, on a que trop de mal à l'avaler (et ce même avec une bonne dose d'absurde et d'humour…). Mais bon, ça, c'est le chic des expositions d'aujourd'hui : toujours vouloir chercher le côté contestataire, révolutionnaire ou choquant, et du coup oublier l'œuvre elle-même. Parfois, il est vrai que c'est agréable de connaître la portée, les conséquences d'un courant ou d'un artiste (la dernière expo concernant un artiste m'ayant fait ressentir cette impression d'influence diffuse était celle de Mondrian à Orsay il y a plus de deux ans, peintre à l'œuvre unique, un des rares avec Picasso à avoir atteint une sorte d'évolution perpétuelle), mais quand on se met à lire sur plusieurs cartons que nous devons jamais cesser de mettre en perspective notre société (car pas seulement l'art) par rapport à Dada, eh bien là, je dis « non »… enfn, non… je dirais plutôt : « ah oui, tiens donc ? »… enfin… non plus… disons que je dirais un truc qui exprimera très bien mon côté dubitatif (dubitatif… à ne pas confondre avec éjaculateur précoce bien entendu !)! Enfin en tout cas, disais-je avant d'être interrompus par moi-même, si on se met à sortir de tels commentaires, il faut au moins essayer de garder un œil sur notre société: la liberté Dada a-t-elle vraiment une chance aujourd'hui où toute innovation est récupéré et décliné selon l'intérêt qu'elle suscite ? L'irrévérence infantile Dada a-t-elle vraiment un sens dans une époque où le cynisme est le mode narrative le plus vendeur ? Donc, l'expo est à mon sens un peu raté, parce qu'elle manque d'honnêteté, elle veut nous faire croire qu'on vit une époque de diversité artistique en droite lignée des Dadas, alors que non… elle veut gonfler notre fierté avec l'existence d'un phénomène (international c'est vrai) où le francisé Tzara sert de juge à toute la création mondiale. Mais elle oublie de nous ouvrir au jugement, à la critique et à la contestation (qui est pourtant censé être le socle du Dadaïsme). Bref, comme d'hab, Beaubourg (oui, j'aime bien personnaliser les musées, car c'est plus facile lorsqu'il s'agit de trouver un responsable, dans le cas présent, c'est Mr Beaubourg !) passe à côté de bien des questions, et préfère nous servir des cartons explicatives hagiographiques guères passionnants (même chose pour les commentaires de Mr Louvres, bizarrement Mr Orsay s'en sort plutôt bien !). Bref, si on oublie de lire les commentaire placardés au mur à l'entrée de chaque petite pièce, ainsi que la mise en avant de la SUPEEERBE idée de scénographie Dada (oui, Mr Beaubourg s'auto-extasie de la liberté laissée aux visiteurs pouvant picorer à sa guise et où bon lui semble Dada, et pouvant donc parcourir les salles librement mais le tout en restant suffisamment guidés pour suivre un parcours selon une chronologie personnelle!?! mouais…), eh bien – et alors seulement- on peut quand même s'intéresser aux œuvres, et de ce côté rien à redire… ouf !
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