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Centre Pompidou

DADA

Centre Pompidou
Art Moderne / Contemporain
5 oct 2005 - 9 jan 2006

France

Dada lui ne sent rien, il n'est rien, rien, rien...
  
 


 



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     « Les objets trouvés sont priés de tenir en laisse leur avis » : si je vous sors une telle phrase aujourd'hui, elle n'aura certainement pas la même résonance qu'à l'époque. Nous, élevés à l'absurde, anglais ou surréaliste, de Woody Allen à John Lennon, on a déjà en gros épuisé les associations contradictoires les plus étonnantes, qu'il s'agisse du sens ou de la forme. Les Révolutions Dada et Surréaliste sont bien loin derrière, mais à ne pas s'y tromper, ce sont elles qui rendent désormais ce type de phrase absurde terriblement banal. Epuisé le filon donc, et le Pop Art, le Situationnisme, le Citationnisme, le Graphitisme, le Psychédelisme (puis arrêtons-là les mots en –isme !) ou bien encore une certaine forme du Land Art ne sont que des dérivés lointaines de ces deux révolutions, les seuls du XXè siècle si on se mettait enfin à employer le mot « révolution » pour des courants qui le justifient véritablement (c'est-à-dire avec pour conséquence un renversement de l'ordre établi et contesté…). Cette exposition donc nous (r)assure sans cesse que Dada n'est pas mort, pourtant si on était un peu honnête, on pourrait dire qu'il a quand même perdu de sa virulence, de son cri d'alarme. Aujourd'hui, en ne croyant plus en rien, en ayant complètement banni la naïveté, l'innocence en Art (sauf quand il s'agit de la tourner en dérision), les pieds-de-nez dada montrés dans Beaubourg apparaissent bien doux et délicats. L'expo cherche peut-être un peu trop à nous faire croire que le message Dada garde aujourd'hui une certaine force, et on a bien du mal à s'en convaincre tellement on est peu surpris, peu secoués. De grands sociologues parlaient de l' « épidermisation » de l'homme face à l'actualité (ouaaaah, bon je m'explique : à force de voir des « catastrophes » à la télé, on finit par avoir une seconde peau, une espèce de carapace, protégeant notre esprit, sauf une petite zone superficielle de l'émotion, l'affect extérieur : en gros on peut pleurer, s'indigner, mais en aucune façon, cette seconde peau nous permet de bien réaliser le drame qui nous est présenté), il en est ainsi de même pour l'Art, et nous devenons vaccinés au Dadaïsme grâce à cette épidermisation que nous avons subi après près de 80 ans d'histoire de l'Art Moderne puis Contemporain. Alors le message qui nous est asséné ici, on a que trop de mal à l'avaler (et ce même avec une bonne dose d'absurde et d'humour…). Mais bon, ça, c'est le chic des expositions d'aujourd'hui : toujours vouloir chercher le côté contestataire, révolutionnaire ou choquant, et du coup oublier l'œuvre elle-même. Parfois, il est vrai que c'est agréable de connaître la portée, les conséquences d'un courant ou d'un artiste (la dernière expo concernant un artiste m'ayant fait ressentir cette impression d'influence diffuse était celle de Mondrian à Orsay il y a plus de deux ans, peintre à l'œuvre unique, un des rares avec Picasso à avoir atteint une sorte d'évolution perpétuelle), mais quand on se met à lire sur plusieurs cartons que nous devons jamais cesser de mettre en perspective notre société (car pas seulement l'art) par rapport à Dada, eh bien là, je dis « non »… enfn, non… je dirais plutôt : « ah oui, tiens donc ? »… enfin… non plus… disons que je dirais un truc qui exprimera très bien mon côté dubitatif (dubitatif… à ne pas confondre avec éjaculateur précoce bien entendu !)! Enfin en tout cas, disais-je avant d'être interrompus par moi-même, si on se met à sortir de tels commentaires, il faut au moins essayer de garder un œil sur notre société: la liberté Dada a-t-elle vraiment une chance aujourd'hui où toute innovation est récupéré et décliné selon l'intérêt qu'elle suscite ? L'irrévérence infantile Dada a-t-elle vraiment un sens dans une époque où le cynisme est le mode narrative le plus vendeur ? Donc, l'expo est à mon sens un peu raté, parce qu'elle manque d'honnêteté, elle veut nous faire croire qu'on vit une époque de diversité artistique en droite lignée des Dadas, alors que non… elle veut gonfler notre fierté avec l'existence d'un phénomène (international c'est vrai) où le francisé Tzara sert de juge à toute la création mondiale. Mais elle oublie de nous ouvrir au jugement, à la critique et à la contestation (qui est pourtant censé être le socle du Dadaïsme). Bref, comme d'hab, Beaubourg (oui, j'aime bien personnaliser les musées, car c'est plus facile lorsqu'il s'agit de trouver un responsable, dans le cas présent, c'est Mr Beaubourg !) passe à côté de bien des questions, et préfère nous servir des cartons explicatives hagiographiques guères passionnants (même chose pour les commentaires de Mr Louvres, bizarrement Mr Orsay s'en sort plutôt bien !). Bref, si on oublie de lire les commentaire placardés au mur à l'entrée de chaque petite pièce, ainsi que la mise en avant de la SUPEEERBE idée de scénographie Dada (oui, Mr Beaubourg s'auto-extasie de la liberté laissée aux visiteurs pouvant picorer à sa guise et où bon lui semble Dada, et pouvant donc parcourir les salles librement mais le tout en restant suffisamment guidés pour suivre un parcours selon une chronologie personnelle!?! mouais…), eh bien – et alors seulement- on peut quand même s'intéresser aux œuvres, et de ce côté rien à redire… ouf !

  Une fois n'est pas coutume, cette expo du Centre Pompidou est beaucoup trop riche, et il faudra minimum la parcourir par deux fois (et 2 fois 4heures, j'entends !), pour venir à bout des 2200m2, des 40 cellules d'une taille moyenne de 30m2, le tout pour un total de près de 10000 œuvres exposées ! On peut donc par exemple en premier lieu s'attarder au travail graphique (peinture, illustration, …), de l'escroquerie de peinture amusante de Picabia aux escroqueries de ready-made qui ont fait la célébrité de Duchamp (mais bon je conseillerai surtout, pour voir de la vraie contestation, de s'attarder dans les salles expressionnistes centrées sur Grosz, qui suscitent peut-être un peu plus d'émotions et de réflexions que les autres salles, mais là, on n'est plus trop dans le Dadaïsme), puis dans une deuxième visite, on peut se concentrer sur l'œuvre littéraire dada, assez passionnante. Car il est bien dommage que peu d'écrits dada soit publiés et aient connus la postérité de nos jours (hormis Aragon, Breton, et encore…). On peu ainsi retenir des associations d'idées amusantes de cet escroc de Picabia toujours, la correspondance dense de l'omniscient Tzara, ou tous les manifestes bidons du courant. On peut aussi pour conclure le tout voir les salles de conclusion (étonnant ce que je dis là ! mais quand vous verrez l'expo, vous comprendrez  !), sur l'ouverture au Surréalisme… d'ailleurs à ce propos, ne soyons pas encore de mauvaise foi : les commentaires essaient de nous faire croire que les œuvres montrées sont un pont entre le dada et le surréalisme, certes, mais n'y a-t-il pas en fait une très nette dominance surréaliste quand même, tant par la période de leur réalisation que par leur composition ? encore, une fois, Mr Beaubourg cherche à extrapoler les choses pour justifier son commentaire et nous en foutre plein la vue… Sacré M. Beaubourg…
  Dans ces dernières salles donc, on a droit à du VRAI surréalisme, ce qui nous permet en tout cas de bien comparer les deux courants nés d'une dissidences entre Breton et Tzara, ce qui nous refait découvrir aussi, et contrairement aux restes de l'expo Dada une œuvre à la composition respectueuse et hérité du classique  (mais glaçante, sans vie, le principal défaut du surréalisme, j'ai toujours trouvé, alors que Dada déborde de vitalité…).

  Après cette courte réflexion (pour éviter la migraine), on peut terminer par le sympathique Entr'acte, de René Clair, apôtre du cinéma surréaliste au côte de Bunuel.

  Et donc au bout de ces deux jours de visite, on peut quand même conclure que c'est une bien belle expo, que l'ensemble, sa mise en scène exigüe et foutraque, sa démesure nous laissent une sensation agréable, et que, même si aucune œuvre Dada ou surréaliste ne saura faire naître en moi les mêmes sensations qu'une œuvre expressionniste, figurative ou abstraite (car si Dada et le surréalisme sont les Révolutions de société du XXè siècle, la vraie Révolution du cœur et de l'esprit reste l'expressionnisme hérité de Van Gogh et des Romantiques d'une certaine manière : à ce propos, courrez voir l'expo au Grand Palais sur la Mélancolie, bourrée d'œuvres émotionnelles), Dada aura eu au moins le grand mérite de renverser les convictions établies et nier toute forme d'endoctrinement. J'ai dit au départ que je ne voyais pas cette portée de nos jours, ce n'est pas tout à fait exact : aujourd'hui, on peut dire que chaque Artiste est dada, puisqu'il suit un chemin personnel, libre, en se foutant des conventions et des courants qui le précèdent (parfois même qui l'ont aidé à sortir de l'ombre). Mais là où la différence se révèle, c'est que chaque Artiste est seul dans sa recherche, il ne forme pas de courant, car il joue perso, et veut juste son succès personnel. Il est Dada dans son individualité, mais bêtement individualiste dans le collectif, alors que le mouvement mené par Tzara est un tumulte mondial, faite de correspondance joyeuse, de pastiches et de références à l'autre sans une once de mauvais esprit. C'était un vrai mouvement, l'un des plus mondiaux qu'il soit… En ce sens encore, Dada est bel et bien mort aujourd'hui. « Relief des Arp ist nicht da“…

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