12.The Village Green Preservation Society

The Kinks
Pop Rock
Pye/PRT  
Angleterre  11/1968

    Il est des injustices qu'il est recommendable de comprendre, avant d'essayer (à son niveau) de les réparer. Celle qui a toujours frappé les Kinks en est une magnifique. Car à bien réfléchir, ce groupe ne nous a-t-il pas fourni autant voire plus de tubes que les Rolling Stones ou les Beatles (enfin pour ces derniers je vous dis ça sans trop y croire), ces deux aigles royaux si écrasants. D'ailleurs je vous propose d'énumérer tous vos tubes préférés des Stones : allez-y citez tous les Jumping J"ack Flash, Paint it black ou autre Simpathy for the devil… Puis penchez-vous un peu sur le moindre best-of des Kinks, et vous ne découvrirez pas moins que Waterloo Sunset, You really got me, sa petite sœur All Day and all of the Night, Dead end street, Sunny afternoon, Victoria, A well respected man (l'inspiratrice du Charmless man de Blur), et j'en passe et des meilleurs… Si ces titres ne vous disent pas grand-chose pour l'instant, écoutez-les et vous comprendrez que vous avez toujours connu ces chansons si particulières et qu'elles auront toujours eu dans votre mémoire musicale une place de choix, une place à part… car les Kinks, c'est bien cela: un groupe à part dans l'histoire du rock, alors que les frères Davies avaient le potentiel d'en faire un phénomène digne des Beatles. Mais voilà, le groupe sera toujours resté à l'ombre de ses deux confrères britanniques. Maintenant essayons un peu de comprendre ce relatif anonymat (car il ne faut rien exagérer -tout le monde connaît les Kinks-, sinon que dire de groupes telles que les Zombies), replongeons–nous au commencement de leur formation, à l'époque même où les Beatles peaufinait leur premier grand album de leur période studio (après l'arrêt des concerts), Rubber soul, suivi du décisif Revolver, les Kinks avait bien du mal à sortir un album à la qualité sonore digne des titres qu'il refermerait. Ce n'était alors que des réunifications de maxis, ou des sortes best-of « annuels » (un peu comme les Stones à cette période de la mi-sixties, mais les Kinks n'avaient guère des titres aussi marquants que Satisfaction ou Ruby Tuesday…). Considérons par exemple l'un des préférés –et à juste titre- de ces premiers albums, Something else, qui referme entre autre Death of a clown, Susannah's still alive et surtout le féérique Waterloo sunset: cet album tout incroyable qu'il soit, n'a surtout pas eu à l'époque la qualité d'enregistrement studio suffisante pour capter à leur juste valeur la beauté de cette dizaine de miniatures pop. Bref, « les Kinks bridés par des soucis techniques », sans doute est-ce une première raison, et puis il y a aussi le mépris américain (les Kinks étaient interdits de concert outre-atlantique), l'isolement de Ray Davies et plein d'éléments perturbateurs qui vont en s'accumulant.

Puis arrive enfin l'enregistrement du Village Green…, album concept écolo, un brin désuet (pendant que les Who cassent des guitares ou que les Stones enflamment l'Amérique, les Kinks chantent à voix nasillarde des comptines à propos d'un chat phénoménal, si, si !), mais la variété de cette album, sa douceur, et sa qualité quasi constante en font une sorte de Pet Sounds britannique. L'album ne connaîtra pas le succès qu'il mérite (trop de retard dans la livraison, et un son qui apparaissait déjà démodé), mais il reste l'un des préférés et des plus cités de la scène rock (John Lennon lui rendant même hommage dans une chanson). Un album champêtre que même Macca ne saura tutoyer au meilleur de sa forme, et de celle de ses Wings. Ainsi, et curieusement, malgré leur digne statut de mine à tubes, les Kinks auront fait de leur seul album qui en est dépourvu (sauf peut-être Starstruck, et Picture Book, merci la pub!) leur plus belle réussite, qui est sans nul doute le plus bel album concept de la pop, un de ces albums que l'on peut écouter en boucle des journées entières – et Dieu seul sait qu'ils sont rares, ces albums!

A ne pas manquer:
    The V.G.P.S.
    Sitting by the riverside
    Starstruck
    Animal farm

Si vous avez aimé, vous avez aussi:
    The Beatles